Décrochage et scolarité
Trois parcours, trois avenirs
Extravertis, renfermés, décidés ou hésitants… Maryrose, Alexandre et Rock ont un point commun: avoir décroché de l’école avant la fin du secondaire. Ces jeunes de 16 et 17 ans entrent dans la vie active et cherchent leur voie dans cette société de diplômés.
«Maryrose, c’est une rose avec des épines.» Telle est la façon dont Yannick Gratton, intervenant à Diapason Jeunesse, décrit la jeune fille de 16 ans. En septembre 2012, elle a décroché, et comme chez d’autres jeunes, les causes sont multiples. Aujourd’hui, elle est en recherche d’emploi et est décidée à reprendre sa vie en main.
«Le décrochage peut venir de partout»
Jeune fille vivante, se déclarant elle-même différente, Maryrose a été intimidée à l’école. «Je suis plus gamer (personne passionnée par les jeux vidéos). Enfin, pas comme les autres filles.» «Et puis, comment peux-tu travailler, quand des gens se font écœurer à côté de toi? Ou bien quand ça tombe sur toi?» L’intimidation n’a pas été l’unique facteur de son décrochage. Car, avec la réforme, l’école a continué à la faire avancer dans son cursus. «Pourtant, je ne pouvais plus suivre depuis le secondaire 1.» Alors, elle a arrêté, sans terminer son secondaire 3.
Le parcours de Rock est différent. Le jeune homme de 17 ans, très lucide sur son propre vécu, l’annonce lui-même: «J’ai fait une dépression pendant au moins un an, suite au décès d’un proche. Mais il y a eu d’autres facteurs. Je voulais peut-être énerver mon père aussi.»
Il est difficile de donner une explication au décrochage. Les jeunes, eux-mêmes, parlent de la multiplicité de facteurs. Et à partir de 16 ans, les écoles ne sont plus obligées de les scolariser. Rock, en difficulté scolaire, l’a vécu: «La directrice m’a convoqué dans son bureau et… je me suis plus ou moins fait mettre dehors.»
La réalité de la vie active
Alexandre est un jeune homme plutôt manuel. À 17 ans, démotivé, il décide d’arrêter l’école pour travailler.
Si Maryrose pouvait compter sur ses parents, pour Alexandre, la situation est plus délicate. «Mon père est en prison et ma mère n’a pas son mot à dire.» Alors, il fait différents petits boulots: deux mois à Michelin, quelques semaines dans un entrepôt, puis dans agence. «Mais ils ont commencé à ne plus m’appeler.»
La réalité de la vie active commença à s’imposer. Les intervenants le constatent souvent: un jeune qui décroche rêve de la grande vie. Il veut travailler, avoir une auto… Pourtant, la réalité est autre.
Rock a pu le constater par lui-même. Le jeune homme dépose une vingtaine de CV et ne reçoit que deux appels. L’un d’eux lui donne espoir pendant 3 semaines, pour finalement ne pas aboutir.
Yannick Gratton, intervenant à Diapason Jeunesse, constate: la plupart des emplois, sans un diplôme du secondaire, sont dans des entrepôts ou bien font des ménages. Bien qu’il reconnaisse l’intelligence des jeunes, il ajoute: «On vit dans une société de diplômés, et il faut ce papier pour travailler.»
Au travers du sport et de la musique, Diapason Jeunesse enseigne aux jeunes les aptitudes à l’employabilité. Comme le travail en équipe, la gestion des conflits ou encore le sentiment d’appartenance. Car, sur un lieu de travail, pas question d’être en retard ou de taper dans un mur. Et il faut arrêter de tout leur passer à cause de leurs blessures, précise Yannick Gratton.
Alors pendant la formation, les jeunes démystifient la vie active. À l’ordre du jour: ouverture d’un compte avec un banquier et atelier gestion de budget. Mais également, apprentissage de la cuisine et du ménage. Le tout pour acquérir des réflexes de base sur le marché de l’emploi.
Résolution des problèmes
À Diapason Jeunesse, d’autres intervenants apprennent aux jeunes à gérer leurs émotions, et à prendre confiance en eux.
«Étonnamment, ça m’a beaucoup aidé», ajoute Rock avec humour, «j’ai appris à ne plus avoir peur de l’avenir». Pour Maryrose, l’objectif était différent. Elle a appris à s’ouvrir et à faire confiance aux autres. «Au début, j’étais renfermée et je ne parlais pas vraiment.»
Aujourd’hui, lorsqu’elle cherche du travail, les effets sont significatifs: «Je n’ai plus peur de m’adresser au gérant. Plutôt que déposer mes papiers, je demande à parler à quelqu’un, au besoin je repasse à un autre moment.»
À 17 ans, Rock a une bonne connaissance de la résolution des problèmes personnels: «Les problèmes sont comme des petits monstres. Moins tu y prêtes attention, plus ils vont se nourrir de toi… Alors, il faut lever le voile, et regarder la réalité en face. C’est au moins 50% du travail, voire 75%.»
Rock a consulté le psychologue de l’école, «très gentil, mais pas très utile». Alors, avec l’aide de sa petite amie, il a travaillé pour surmonter sa dépression. «Faut se raccrocher à tout, tant que ce n’est pas une corde et un crochet.»
Si tous n’ont pas développé leur propre philosophie, les jeunes doivent affronter leurs problèmes pour avoir un meilleur avenir.
Trouver sa voie
Alexandre a décroché, car il voulait travailler. Son grand-père ayant une ferme, il avait déjà expérimenté le travail de la terre. Alors, avec l’aide d’intervenants de Perspective Jeunesse, il décide de profiter de cette expérience. Il se présente aux Pousses urbaines pour y faire un stage d’horticulture et est accepté. Une première victoire pour le jeune homme.
Quant à Maryrose, ses parents l’ont soutenue lorsqu’elle décida d’arrêter l’école. «Ils voyaient que je n’arrivais pas à suivre, et que je n’allais plus à mes cours.» Alors, après une période difficile, elle décide de se reprendre en main. «Diapason Jeunesse m’a littéralement sauvé la vie.» Maintenant, elle sait qu’elle va reprendre ses études, «un DEP en esthétique peut-être», même si son cursus n’est pas encore défini.
Rapport à l’école
Leur point commun est d’avoir un problème avec le système éducatif. Alexandre le reconnaît, «l’école, c’est important». Lui a essayé d’aller aux adultes, mais cela n’a pas fonctionné, car l’encadrement n’était pas suffisant. Si le jeune homme n’a pas encore de trajectoire définie, avec l’agriculture il a trouvé un secteur d’activité qui lui plait.
Rock a des projets pour l’avenir, il veut devenir infographiste: «faire des cartes de visite et tout ça». Il veut également emménager en appartement dans les mois à venir. «J’attends déjà de terminer mes 3 mois d’approbation à Métro.» Dans un même temps, le jeune homme compte terminer son secondaire par correspondance, tout en travaillant. «Après, on verra.»
Quant à Maryrose, elle doit davantage prévoir l’avenir. Elle vit en centre et, à ses 18 ans, elle ne pourra pas retourner chez ses parents. «Mon argent est compté.» En recherche d’emploi, elle calcule son budget en fonction de l’avenir.
Elle envisage de terminer ses études aux adultes, car pour les jeunes comme elle, «qui ont été intimidés», c’est ce qu’il y a de mieux. «T’as pas d’idiots à côté de toi, et tu peux avancer à ton rythme.» «Par contre, si c’est du monde populaire qui ont juste de la difficulté, je leur conseille d’aller plutôt dans des aides aux devoirs. Ou de voir les ressources de l’école.» «En tout cas, c’est normal de vouloir une pause. Il faut avoir de bonnes bases et après tu repars.» «J’ai encore le temps de me reprendre», rit-elle.
Rock a une vision légèrement différente: «Ceux qui se font intimider, je leur conseille de persévérer, car le temps passe et l’école va se terminer. Le gars qui t’a écoeuré, il va finir par lâcher et il ira au McDo. Toi, tu vas passer ton DEP et tu auras ta petite maison… Puis, je ne sais pas pourquoi je rajoute ça, mais des classes de 35, sérieusement!? Déjà à 25, on avait de la misère à suivre.»
Chacun de ces jeunes a un parcours et un vécu très différent. Qu’ils aient décroché par envie de gagner leur vie, ou pour d’autres raisons plus personnelles, chacun d’eux a le potentiel d’un bel avenir.
Le décrochage en quelques chiffres
- Entre 1999 et 2009, le taux de décrochage au niveau provincial a sensiblement diminué : de 23,5% en 1999, il a diminué à 20,5% en 2009.
- Dans la région de Montréal, il reste supérieur à la moyenne provinciale, même s’il a diminué: de 28,6% en 1999 à 24,6% en 2009.
- L’inégalité entre les sexes est réelle. En 2009, 25,5% des garçons ont décroché sans leur diplôme du secondaire, contre 15,5% des filles.
- Plus alarmants à la Commission scolaire de la Pointe-de-l’Île, 35% des jeunes du secondaire décrochent.
- À la Commission scolaire Lester-B.-Pearson, le taux est le moins élevé de la province, avec une moyenne de moins de 15%.
- À Montréal, le ministère de l’Éducation note une concordance entre le décrochage scolaire et la vulnérabilité socioéconomique. Néanmoins, il existe des exceptions, notamment dans les CLSC de NDG-Montréal-Ouest, René-Cassin ou Pointe-aux-Trembles-Montréal-Est.
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Avortement pro et anti choix
Pour ou contre l’avortement: pro-choix et anti-choix
Lisa Melia__DOSSIERS Santé, Sexualité et Avortement
Les canadiennes peuvent-elles avorter facilement? En 1988, la Cour suprême du Canada a déclaré invalides les articles 251 et 252 du Code criminel, qui interdisaient l’interruption volontaire de grossesse (IVG), car c’est l’un des droits fondamentaux de la femme que de disposer librement de son corps, droit qui est d’ailleurs protégé par la Charte constitutionnelle. Pour autant, des mouvements dits «pro-choix», c’est-à-dire qui soutiennent le recours à l’avortement, tels que Canadian for choice, la Coalition pour le droit à l’avortement au Canada ou encore la Fédération Québécoise pour le planning des naissances (FQPN), considèrent que de nombreuses améliorations sont à mener.
La première d’entre elles concerne l’information, très largement insuffisante ou partiale. Canadian for choice affirme que dans de nombreux établissements hospitaliers, l’accès à l’information est volontairement bloqué par le personnel médical, qui refuse d’aiguiller les femmes désirant avorter. Le site de l’organisme propose ainsi des témoignages de femmes dont une partie a dû subir un comportement hostile des infirmiers et des médecins.
Certaines femmes qui veulent obtenir un IVG se voient même traitées d’irresponsables, car le personnel médical «présume qu’elles n’ont pas pris de contraception, qu’elles n’ont pas fait attention.» Or, une étude de la FQPN montre que souvent, les femmes demandent ces services en raison d’une défaillance de la contraception.
L’accès aux services d’IVG
La FQPN soutient par ailleurs que l’accessibilité aux soins est très inégale. En effet, seulement 17,8% des hôpitaux canadiens proposent des services complets d’avortement et le chiffre tombe à 12% des Centres locaux de services communautaires (CLSC) pour le seul Québec. La FQPN estime que les CLSC devraient pourtant offrir un suivi complet des femmes enceintes qui veulent interrompre leur grossesse, depuis la prise de décision a priori, jusqu’au suivi psychologique après l’intervention.
Bien que l’avortement soit gratuit, les femmes doivent parfois parcourir de longues distances pour accéder à un établissement qui les acceptent, ce qui entraînent des coûts. D’autant plus que les temps d’attente avant de subir l’opération peuvent aller de deux à six semaines. La Coalition pour le droit à l’avortement au Canada souligne que de plus en plus de canadiennes doivent donc aller dans des cliniques privées, aussi bien pour recevoir l’opération rapidement que pour être reçue par un personnel accueillant et attentif. Or, bien que cela soit prévu par la loi, les provinces de Nouveau-Brunswick et du Québec sont les seules à ne pas rembourser intégralement les patientes dans ces cas là.
Les mouvements anti-choix
Enfin, les mouvements opposés à l’avortement, qui se définissent comme «pro-vie» ont une influence de plus en plus importante. Le 29 mai 2009, George Tiller, médecin pratiquant l’avortement au Kansas, a été abattu par un militant anti-choix, un geste extrême que même les mouvements pro-vie condamnent.
Canadian for Choice souligne pourtant que les mouvements anti-choix tentent régulièrement de faire peur aux femmes enceintes, de les culpabiliser. Ils sont «variés et de plus en plus sophistiqués», affirme la FQPN, qui cite par exemple les stratégies pour occuper les sièges d’usagers des conseils d’administration d’établissements, et qui amènent alors régulièrement à l’ordre du jour la question de la pertinence du maintient des services de planning.
«Force nous est de constater qu’il reste encore beaucoup de chemin à parcourir et d’action à poser avant d’obtenir des services accessibles, de qualité, gratuits et respectueux du choix des femmes dans le réseau public de la santé et des services sociaux», conclue la FQPN.
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